Thorwald Jørgensen : un voyage singulier dans l'éther
Samedi, le 26 avril 2025, à la salle de spectacle Saint-François-Xavier de Prévost, dans la Série Grands classiques, Diffusions Amal'Gamme produisait Thorwald Jørgensen avec le thérémine classique, accompagné par le fabuleux pianiste Jean Desmarais. Nous allions être conviés à sortir des sentiers battus!
Le sympathique et chaleureux Thorwald Jørgensen est un musicien possédant une formation classique en percussion. Un jour, il y a une quinzaine d'années, il a entendu le thérémine sur YouTube et ce fut le coup de foudre.
Mais de quoi parle-t-on au juste ?
Le thérémine a été inventé en 1920 par Léon Theremin, un physicien russe. Ce chercheur travaillait sur une expérience scientifique autour des champs magnétiques, en l'occurrence un détecteur de mouvement pour l'armée soviétique. Il a découvert "accidentellement" qu'en approchant les mains d'une antenne, il pouvait contrôler le son. Sa découverte fut transformée en un instrument de musique à part entière sous la recommandation de Lénine qui a utilisé cette découverte comme vitrine à ce que la science soviétique pouvait faire.
Mais comment ça marche?
La thérémine est le seul instrument de musique que l'on ne touche pas.
Il est composé de deux antennes. Une antenne verticale qui contrôle la hauteur du son, la note. Une boucle horizontale qui contrôle le volume. En approchant la main de l'antenne verticale, on modifie le champ électromagnétique. Cela fait monter ou descendre la hauteur du son. La main au-dessus de la boucle contrôle l'intensité du son, du plus fort au plus doux.
C'est un instrument qui se joue dans l'air.
Thorwald Jørgensen est un maître du thérémine. Il joue avec grâce. Son approche est teintée par sa formation de musicien classique. Il sculpte le silence et fait vibrer l'air avec douceur. Son jeu est parfaitement maîtrisé. Posé et précis. Il nous démontre à quel point cet instrument peut devenir expressif et profond.
Mais qu'est-ce qu'on entend?
Une voix pure, désincarnée, sans souffle. Une voix qui flotte hors du temps et du corps. Le mystère du thérémine réside en l'absence de respiration, pas de vibrato naturel, sauf celui que la main décide. Tout est suspendu, éthéré.
Ce qui nous sort de notre zone de confort habituel est le manque de pulsation viscérale qu'on sent chez le chanteur vivant. Et ce vide, rend le thérémine hypnotique et presque fantomatique. C'est une expérience très intéressante et enrichissante pour l'auditoire.
Cet instrument suscite la curiosité, l'admiration, l'étrangeté, la contemplation, mais à mon avis, il ne transperce pas toujours l'âme comme peut le faire la voix humaine ou une corde de violoncelle frémissante.
Il touche l'esprit, même peut-être l'imaginaire. Il reste à distance de cœur comme une étoile qu'on admire dans le ciel, sublime, mais inaccessible. Une beauté cosmique.
Thorwald Jørgensen nous a proposé un voyage singulier dans l'éther par l'étrange beauté d'une voix sans souffle.
Carole Trempe